Au Kazakhstan, les assistants de la police voient leurs missions élargies
Au Kazakhstan, les assistants de la police voient leurs missions élargies

Au Kazakhstan, le rôle des assistants de la police entre dans une nouvelle phase. Une loi promulguée fin décembre 2025 élargit leurs prérogatives, encadre strictement l’usage de la force et précise les conditions d’accès à cette fonction bénévole. Derrière ce dispositif, les autorités entendent renforcer la prévention des délits et la présence de terrain, tout en maintenant une ligne claire entre citoyens engagés et policiers professionnels.

Des assistants au cœur du dispositif policier et de la prévention des délits

Le 30 décembre 2025, le président Kassym-Jomart Tokaïev a signé une loi modifiant le cadre de la prévention des infractions au Kazakhstan. Ce texte redéfinit le statut et les missions des assistants de la police, appelés à jouer un rôle accru aux côtés des forces de l’ordre. Le nouveau cadre légal précise d’abord comment les assistants interviendront concrètement aux côtés de la police. Ces citoyens bénévoles participent déjà à des patrouilles conjointes, à la sécurisation d’événements publics et à la protection de lieux sensibles. Désormais, leur mission est formellement inscrite dans la loi, ce qui renforce leur rôle dans la prévention des délits, dans l’appui aux enquêtes de terrain et dans la recherche de personnes disparues. Toutefois, et c’est un point central, les assistants ne deviennent pas des policiers. Ils n’intègrent pas la hiérarchie de la police et n’exercent pas de fonctions professionnelles relevant de la force publique.

Dans ce dispositif, la police conserve le contrôle opérationnel. Les assistants agissent uniquement sous la coordination des forces de l’ordre et dans un périmètre clairement défini. Ils peuvent, par exemple, aider à sécuriser une zone avant l’arrivée d’unités professionnelles ou signaler rapidement des délits constatés. Cette articulation vise à accroître la réactivité des forces de sécurité, tout en évitant toute confusion de rôles.

Un point sensible concerne l’usage de la force. La loi autorise désormais les assistants, dans des situations exceptionnelles, à recourir à une force physique limitée pour mettre fin à une infraction ou retenir une personne avant l’arrivée de la police. Cette possibilité est strictement encadrée. Elle exclut tout usage d’armes ou de moyens spéciaux réservés à la police, comme les matraques, les gaz incapacitant ou les dispositifs électriques. En outre, l’usage de la force est interdit contre les femmes, les mineurs et les personnes manifestement en situation de handicap, sauf en cas d’agression armée ou d’attaque collective violente.

Qui peut devenir assistant de la police et sous quelles règles ?

La loi détaille également les conditions pour devenir assistant de la police, afin d’éviter toute dérive. Le principe repose sur le volontariat. Tout citoyen souhaitant s’engager doit déposer une demande officielle auprès des services de police locaux. Cette candidature fait ensuite l’objet de vérifications, notamment sur l’identité et l’absence d’obstacles légaux, avant d’être enregistrée par la mairie dans un délai de sept jours. Ce processus vise à garantir que les assistants présentent des garanties minimales de fiabilité.

Certaines catégories de personnes sont explicitement exclues. Les mineurs ne peuvent pas exercer cette fonction. Sont également exclus les individus faisant l’objet d’une enquête pénale, ceux inscrits sur des registres de prévention pour comportements à risque, ou encore les personnes ayant été récemment condamnées pour des infractions intentionnelles. De plus, les citoyens suivis pour des raisons médico-psychiatriques ne peuvent pas être assistants, une restriction justifiée par la nécessité d’assurer la sécurité de tous dans les interventions de terrain.

Ces règles traduisent une volonté claire de la police de conserver un contrôle strict sur ce réseau de bénévoles. L’objectif est d’éviter que des individus aux profils problématiques n’accèdent à une position leur permettant d’intervenir dans des situations potentiellement conflictuelles. Par ailleurs, la participation peut être interrompue à tout moment. La loi prévoit la fin du statut d’assistant en cas de démission volontaire, de poursuites pénales, de sanction administrative pour infraction intentionnelle, de départ définitif à l’étranger, ou pour des raisons médicales ou de décès.

Un encadrement strict de la force et un soutien mesuré à la police

L’élargissement des prérogatives des assistants soulève des interrogations sur l’équilibre entre participation citoyenne et monopole de la force légitime. Les autorités kazakhstanaises insistent sur le fait que ce dispositif ne vise pas à déléguer des missions régaliennes, mais à renforcer la prévention et la présence sur le terrain. Selon le ministère de l’Intérieur, les assistants n’ont pas vocation à remplacer la police, mais à l’appuyer dans des situations où la rapidité d’intervention et la connaissance locale peuvent faire la différence.

Les chiffres illustrent l’ampleur du phénomène. Environ 50.000 assistants et volontaires participent déjà à des actions conjointes avec la police à travers le pays. Cette mobilisation massive montre que la coopération entre citoyens et forces de l’ordre n’est pas nouvelle, mais qu’elle bénéficie désormais d’un cadre juridique plus précis. Les autorités espèrent ainsi réduire les zones grises qui existaient auparavant, notamment en matière de responsabilité et de limites d’intervention.

La question de la force reste néanmoins centrale. La loi insiste sur le caractère proportionné et nécessaire de toute action menée par un assistant. Toute utilisation excessive peut engager la responsabilité individuelle du volontaire, un rappel destiné à dissuader les abus. Cette précision répond à des préoccupations récurrentes dans l’opinion publique, notamment sur le risque de violences ou d’erreurs commises par des non-professionnels. En fixant des interdictions claires et des exceptions strictement définies, le législateur cherche à rassurer et à préserver la légitimité de la police.

Enfin, ce dispositif s’inscrit dans une stratégie plus large de modernisation de la police au Kazakhstan. En associant les assistants à la prévention des délits et au maintien de l’ordre, les autorités entendent renforcer le lien entre la police et la population. Cette approche repose sur l’idée que la sécurité ne peut être assurée uniquement par des moyens coercitifs, mais aussi par l’implication encadrée des citoyens. Reste à observer comment cette réforme sera appliquée sur le terrain et si elle parviendra à concilier efficacité opérationnelle, respect des droits et contrôle de l’usage de la force.

Par Rodion Zolkin
Le 12/30/2025

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