En Ouzbékistan, les autorités misent sur l’intelligence artificielle pour transformer en profondeur l’économie et les services publics. De la santé à la justice, plus de soixante projets sont en préparation, signe d’une stratégie nationale ambitieuse portée par l’État.
Ouzbékistan : une stratégie nationale pour généraliser l’intelligence artificielle
Si le Kazakhstan fait office de champion en termes d’adoption de l’intelligence artificielle en Asie centrale, l’Ouzbékistan, l’autre poids lourd régional, n’entend pas être en reste. Le gouvernement de l’Ouzbékistan a approuvé une feuille de route dédiée à l’intégration de l’intelligence artificielle dans les politiques publiques et les secteurs économiques (santé, justice, services publics). Cette initiative s’inscrit dans la stratégie numérique nationale, qui entend faire du pays un centre régional d’innovation technologique. L’intelligence artificielle y occupe une place centrale, avec des projets pilotes déjà en cours et des objectifs chiffrés à court terme.
Le gouvernement ouzbek a validé une liste de 60 projets prioritaires utilisant l’intelligence artificielle. Tous sont à mettre en œuvre d’ici fin 2026. Ces initiatives concernent notamment la santé, les transports, les services publics, l’industrie et le système judiciaire. Une résolution du Cabinet des ministres datée du 10 juillet fixe les « orientations stratégiques et les projets sectoriels pour l’intégration de l’intelligence artificielle dans la gouvernance publique et l’économie ».
Dans le domaine de la santé, plusieurs programmes pilotes sont déjà identifiés. À Tachkent, dans les districts d’Almazar et Yunusabad, un assistant médical numérique à base d’intelligence artificielle sera testé. Il permettra d’enregistrer automatiquement les examens des patients grâce à la reconnaissance vocale. D’autres essais concerneront le dépistage précoce du cancer, via l’analyse automatisée d’images de mammographie, de radiographie et de scanner, selon la même source.
Parallèlement, un module d’assistance juridique sera mis à disposition des citoyens pour calculer les frais de justice et obtenir des conseils de base. Cette approche illustre la volonté des autorités de démocratiser l’accès au droit tout en optimisant le travail des tribunaux. Le système judiciaire doit, à terme, utiliser l’intelligence artificielle pour anticiper certains résultats de dossiers et réduire les délais de traitement.
Former les talents et bâtir l’infrastructure de l’avenir
L’Ouzbékistan ne se contente pas de déployer des outils d’intelligence artificielle : il veut créer un écosystème complet. Le pays s’est fixé pour objectif de former 100.000 jeunes aux technologies de l’intelligence artificielle d’ici la fin de l’année dans le cadre du programme « Un million de leaders de l’intelligence artificielle ». Ce plan s’accompagne de la création de dix laboratoires scientifiques spécialisés, répartis sur le territoire, et de l’installation de serveurs haute performance pour soutenir les futures applications. La constitution d’un référentiel de données nationales (Big Data) est également prévue, tandis que l’infrastructure complète de traitement des données doit être opérationnelle d’ici mai 2026.
Un appel d’offres pour la construction d’un grand cluster d’intelligence artificielle est déjà lancé, et une version de test serait en cours d’exploitation. Cette architecture doit permettre de mutualiser les ressources entre les universités, les entreprises privées et les institutions publiques.
Une gouvernance numérique et éthique en construction
Pour encadrer ce déploiement rapide, les autorités misent sur un cadre réglementaire clair. La Chambre législative du Parlement a récemment examiné un projet de loi visant à réguler l’intelligence artificielle et à renforcer la protection des données personnelles. Ce texte prévoit notamment l’obligation d’indiquer quand un contenu a été généré par une IA, ainsi que des sanctions en cas d’utilisation abusive des données.
Par ailleurs, Un Code national d’éthique de l’intelligence artificielle doit être adopté avant fin 2025. Ce document fixera les principes fondamentaux de transparence, de responsabilité et de respect de la vie privée dans le développement des algorithmes utilisés par l’État et le secteur privé. L’Ouzbékistan s’inspire ainsi des standards internationaux, tout en cherchant à préserver sa souveraineté numérique.
Sur le plan diplomatique, le pays multiplie les coopérations technologiques. Lors d’une rencontre entre le président ouzbek Shavkat Mirziyoyev et son homologue chinois, les deux dirigeants ont évoqué la création d’un centre ouzbéko-chinois de développement de l’intelligence artificielle. L’objectif est de mutualiser les compétences, d’attirer les investissements étrangers et de favoriser la formation conjointe de spécialistes.
Enfin, l’écosystème local bénéficie du soutien du parc technologique « IT Park Uzbekistan », véritable comme le cœur de l’innovation numérique du pays. Ce hub rassemble start-up, entreprises IT et instituts de recherche. Il offre un environnement fiscal favorable et des programmes d’incubation, contribuant directement à l’essor de l’intelligence artificielle nationale.
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