Au Kazakhstan, l’armée sonde l’esprit de ses soldats avec une IA
L'armée intelligence artificielle

À la croisée du progrès numérique et des impératifs sécuritaires, la Garde nationale du Kazakhstan a lancé un programme de test psychologique automatisé fondé sur l’intelligence artificielle. Une première régionale qui intrigue autant qu’elle interroge.

Quand l’armée repère les troubles mentaux de ses forces vives

Au cœur de cette expérimentation technologique, un objectif clair affiché par les autorités militaires : détecter, au plus tôt, les troubles psychologiques chez les soldats pour préserver l’unité et la performance des troupes. Une ambition résumée sans détour par Kayrat Umbetov, commandant adjoint de la Garde nationale chargé des questions sociales et éducatives : « Les technologies modernes nous ouvrent de nouvelles perspectives dans le domaine de la psychologie et de la santé mentale, en nous permettant non seulement de détecter à temps les premiers signes d’une mauvaise santé émotionnelle, mais aussi de prévenir leur développement. Notre objectif est de créer un système d’alerte précoce efficace afin que chaque militaire puisse bénéficier d’une aide et d’un soutien en temps utile ».

En clair : l’intelligence artificielle n’est pas ici un gadget, mais un levier stratégique, censé anticiper les fractures mentales avant qu’elles ne menacent la stabilité du corps militaire.

L’armée kazakhstanaise mise sur la précision adaptative de l’intelligence artificielle

La technologie déployée, conçue par Yergali Mabiyev, repose sur une architecture hybride d’évaluation psychologique. Le principe : un algorithme qui module les questions posées aux soldats en fonction de leurs réponses précédentes. Ce mécanisme adaptatif réduit la redondance, isole les variables pertinentes et affine la lecture du profil mental du soldat testé.

Selon Yergali Mabiyev, cette intelligence artificielle offre une capacité d’analyse supérieure aux méthodes classiques de dépistage. Et pour cause : « [La structure] permet de valider les résultats de l’analyse et de formuler des recommandations pertinentes, tout en adaptant dynamiquement la complexité des questions », a-t-il expliqué lors de la présentation du projet.

Contrairement aux tests standardisés rigides, ici les algorithmes s’ajustent à la singularité de chaque répondant. Une promesse d’efficacité… mais aussi une prise de pouvoir silencieuse des systèmes sur l’évaluation humaine.

Une technologie sécurisée qui garantit le respect de la vie privée

Déployée en interne sur les serveurs des unités militaires, cette technologie ne transite pas par le cloud. C’est une architecture locale, vantée pour sa sécurité. Selon les responsables militaires, la phase de test concerne, les nouvelles recrues du district militaire d’Astana, ce qui laisse présager une généralisation rapide si l’outil se montre concluant. Le contexte laisse peu de doute sur la direction prise : la technologie s’installe dans les rouages les plus sensibles de l’armée.

Et si l’intelligence artificielle venait modeler la hiérarchie de la résilience mentale ? Car derrière cette apparente démarche de santé publique, c’est aussi une norme psychique attendue du soldat idéal qui se dessine.

Le Kazakhstan n’en est pas à son coup d’essai en matière de numérisation. Depuis février 2024, une stratégie nationale de développement de l’IA pour cinq ans a été lancée, avec pour objectif d’intégrer les technologies d’automatisation dans l’éducation, la sécurité publique et désormais, les forces armées.

Illustration www.freepik.com.

Par Rodion Zolkin
Le 05/19/2025

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