Taobao s’installe au Kazakhstan : le e-commerce chinois avance ses pions
Taobao Alibaba

Une interface flambant neuve, des bons d’achat aguicheurs, une promesse d’accessibilité pour les acheteurs kazakhstanais… : derrière cette opération de séduction numérique, que cache vraiment l’arrivée de Taobao au Kazakhstan ?

Taobao franchit les frontières : une arrivée programmée au Kazakhstan

Taobao, la célèbre plateforme chinoise de commerce électronique, propriété du conglomérat Alibaba Group, vient d’annoncer son implantation au Kazakhstan en lançant une version de son application en russe, marquant son entrée opérationnelle dans le marché centré sur l’Asie centrale.

Karolina Ren, directrice de Taobao pour l’Asie centrale, a salué cette décision stratégique par une déclaration pour le moins ambitieuse : « Nous sommes ravis de présenter officiellement Taobao au Kazakhstan, en lançant une nouvelle option linguistique qui marque notre premier pas significatif vers une interaction directe avec les utilisateurs de la région ».

Taobao au Kazakhstan : de la barrière linguistique à l’outil de fidélisation

Avec son interface intégralement traduite en russe, Taobao supprime un des obstacles majeurs à l’adoption de sa plateforme par les consommateurs locaux. Mais l’effort ne s’arrête pas là : la société déploie un arsenal promotionnel bien huilé pour capter l’attention des internautes kazakhstanais.

Une offre de bienvenue promet 30 yuans (environ 2.120 tenges, ou 3,75 euros) de réduction pour tout achat supérieur à 31 yuans, et ce n’est que le début. Pour les amateurs de « déballage en direct », la plateforme propose jusqu’à 200 yuans (environ 14.120 tenges, ou 25 euros) en bons d’achat, en échange de vidéos de type unboxing, une méthode de marketing viral bien connue des réseaux sociaux.

Derrière ces incitations se dessine une stratégie de localisation agressive. L’application convertit automatiquement les prix en yuans en tenges, présente une sélection de produits « tendance » et propose un réseau logistique maillé : plus de 200 points de retrait répartis entre Almaty, Astana et les autres régions du pays.

Pour séduire les sceptiques, la livraison est offerte dès 99 yuans (environ 6.990 tenges, ou 12,40 euros), un seuil raisonnable dans un pays où le pouvoir d’achat est en constante mutation. Et pour les transactions, les options Visa, MasterCard et Alipay International assurent une accessibilité quasi universelle.

Taobao entend être en règle par rapport à la fiscalité kazakhstanaise

Contrairement à de nombreuses plateformes numériques qui opèrent en dehors des radars fiscaux des pays hôtes, Taobao a fait le choix d’une régularisation fiscale explicite : enregistrement au registre kazakh des entreprises assujetties à la TVA, affichage transparent des taxes à chaque transaction, conformité avec le taux de 12% en vigueur (potentiellement 16% selon le futur Code fiscal).

Cette position proactive répond à un contexte juridique de plus en plus strict. Le 31 mars 2025, le ministre de l’économie nationale, Serik Zhumanğarin, a rappelé que tout site étranger non enregistré pour la TVA pourrait être bloqué sans sommation. Un avertissement que Taobao n’a visiblement pas pris à la légère. Son inscription au registre local renforce sa légitimité face aux consommateurs et au régulateur, dans un pays où l’e-commerce génère 360 milliards de tenges de recettes fiscales, surpassant les commerces physiques.

Le Kazakhstan : prochain terrain de jeu du géant Taobao ?

L’implantation de Taobao ne s’inscrit pas dans un vide commercial. Le Kazakhstan représente un carrefour stratégique pour les ambitions numériques chinoises, avec des échanges commerciaux bilatéraux atteignant 43,8 milliards de dollars en 2024.

Des poids lourds comme JD.com, Temu ou AliExpress sont déjà présents. Mais Taobao, fort de ses succès à Singapour et en Malaisie, semble vouloir appliquer au Kazakhstan une recette éprouvée : interface adaptée, offres personnalisées, logistique rationalisée, fiscalité domestiquée.

Reste toutefois un point d’ombre : l’absence persistante d’une version en langue kazakhe, pourtant officielle dans le pays. Un choix qui pourrait freiner l’adoption du service en dehors des centres urbains russophones. La direction de Taobao évoque une extension linguistique future, sans calendrier ferme.

Par Païsiy Ukhanov
Le 05/13/2025

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