L’avenir du Kirghizstan au sein de l’Union économique eurasiatique semble de plus en plus incertain face aux nouvelles propositions de législation russe sur l’emploi des migrants. Les restrictions proposées par la Russie pourraient contredire les principes fondamentaux de l’Union, compromettant ainsi les avantages que le Kirghizstan pourrait voir de son adhésion continue à cette organisation.
Russie : l’accès de la main-d’œuvre étrangère à bon nombre de secteurs pourrait être restreint
L’Union économique eurasiatique, fondée en 2015, vise à promouvoir l’intégration économique entre ses membres, à savoir notamment la Russie, l’Arménie, la Biélorussie, le Kazakhstan et le Kirghizstan. Cette organisation repose sur quatre libertés fondamentales : la libre circulation des biens, des personnes, des services et des capitaux. Ces principes promettent de faciliter les échanges et de promouvoir la croissance économique au sein des États membres. Pour le Kirghizstan, membre depuis sa création, ces libertés étaient synonymes de meilleures opportunités économiques et d’intégration régionale accrue.
Cependant, ces promesses sont aujourd’hui remises en question par des initiatives législatives récentes en Russie. Un projet de loi, actuellement débattu à la Douma, le parlement russe, propose de restreindre l’accès des migrants à plusieurs secteurs d’emploi, y compris l’éducation, la médecine, le transport de passagers et les services de livraison, dans les cas où le salaire dépasse le seuil de 100.000 roubles (1.070 euros). Les auteurs du projet de loi justifient ces restrictions par la nécessité de préserver les valeurs culturelles russes et d’assurer un niveau élevé de qualité et de responsabilité dans les services fournis.
Le vice-président du Cabinet des ministres du Kirghizstan remet en question l’adhésion de son pays à l’Union économique eurasiatique
Les travailleurs kirghizes, qui bénéficient actuellement des droits garantis par l’Union économique eurasiatique, pourraient être gravement affectés si ces restrictions sont adoptées. Selon Edil Baisalov, vice-président du Cabinet des ministres du Kirghizstan, « en cas d’interprétation différente et d’assimilation des Kirghizes à des migrants de pays tiers, il sera très difficile de justifier à notre peuple le sens de la participation à l’Union économique eurasiatique », a-t-il écrit sur son compte X (anciennement Twitter) le 2 août 2024. Cette déclaration souligne les préoccupations croissantes des autorités kirghizes concernant la compatibilité des nouvelles mesures russes avec les principes de l’Union.
En effet, les restrictions proposées semblent aller à l’encontre des engagements pris lors de la formation de l’Union économique eurasiatique. Les travailleurs kirghizes, qui ont migré en Russie en espérant de meilleures opportunités, se retrouvent confrontés à des incertitudes grandissantes. La possibilité de perdre leur emploi ou de se voir refuser l’accès à des secteurs clés de l’économie pourrait engendrer une détérioration de leur situation économique et sociale. En outre, cela pourrait créer un sentiment d’injustice et de frustration parmi les citoyens kirghizes, qui voient leur droit à une libre circulation et à une participation égale au marché du travail remis en cause.
Le dilemme kirghize au sein de l’Union économique eurasiatique
Le Kirghizstan se retrouve ainsi face à un dilemme complexe. D’une part, l’adhésion à l’Union économique eurasiatique a permis au pays de bénéficier de certains avantages économiques et de renforcer ses liens avec ses voisins eurasiens. D’autre part, les récentes évolutions législatives en Russie mettent en péril ces bénéfices, soulevant des questions sur la pertinence de continuer à faire partie de l’Union. Si les restrictions proposées entrent en vigueur, elles pourraient réduire considérablement les avantages de l’adhésion du Kirghizstan à l’Union économique eurasiatique, incitant peut-être le gouvernement kirghize à reconsidérer sa position.
Pour les dirigeants kirghizes, il est essentiel de trouver un équilibre entre la préservation des avantages économiques offerts par l’Union économique eurasiatique et la défense des droits de leurs citoyens à l’étranger. Cela pourrait nécessiter des négociations diplomatiques avec la Russie pour garantir que les principes fondamentaux de l’Union soient respectés et que les travailleurs kirghizes ne soient pas injustement discriminés. En fin de compte, l’avenir du Kirghizstan au sein de l’Union économique eurasiatique dépendra de sa capacité à naviguer ces défis et à s’assurer que l’intégration économique reste bénéfique pour tous ses citoyens.