Kirghizstan : des défenseurs des droits humains refoulés à l’aéroport
Kirghizstan : des défenseurs des droits humains refoulés à l’aéroport

Recalés à l’aéroport de Bichkek sans justification officielle, des représentants de la Fédération internationale pour les droits humains ont été empêchés d’entrer au Kirghizstan alors qu’ils venaient participer à un festival consacré à la lutte contre la propagande et à la défense des libertés fondamentales, un épisode révélateur des tensions persistantes autour des droits humains dans le pays.

Kirghizstan : un refus d’entrée qui interroge les libertés fondamentales et la place des ONG internationales

Dans la nuit du 11 au 12 décembre 2025, les autorités kirghizes ont refusé l’entrée sur leur territoire à une délégation de la Fédération internationale pour les droits humains, une organisation historique de défense des libertés fondamentales, déclenchant de vives réactions dans les milieux associatifs et internationaux et ravivant les inquiétudes sur l’évolution des droits humains au Kirghizstan.

L’incident s’est produit à l’aéroport international Manas de Bichkek, où la police aux frontièresa empêché trois représentants de la Fédération internationale pour les droits humains de franchir la frontière, alors même que leurs documents de voyage étaient valides. Toutefois, malgré les demandes répétées, aucune explication écrite ni base juridique précise n’a été communiquée aux personnes concernées par les autorités kirghizes.

Dans ce contexte, les membres de la délégation ont vu leurs passeports temporairement confisqués, avant d’être contraints de reprendre un vol à destination de la Turquie, d’où ils étaient arrivés. Pourtant, ils se rendaient au Kirghizstan pour participer au 19e Festival international du film documentaire sur les droits humains Bir Duino, organisé du 12 au 16 décembre 2025 à Bichkek, un événement reconnu pour ses débats sur la liberté d’expression, la lutte contre la propagande et la protection des droits civils.

Kirghizstan et la FIDH : une organisation centenaire face à un climat de méfiance croissante

La Fédération internationale pour les droits humains, plus connue sous l’acronyme FIDH, est l’une des plus anciennes organisations internationales de défense des droits humains, fondée en 1922 et basée à Paris. Elle regroupe aujourd’hui plus de 190 organisations membres dans plus de 110 pays, et intervient régulièrement au Kirghizstan notamment et en Asie centrale plus largement à travers des missions d’observation, de documentation et de plaidoyer. Ainsi, la FIDH agit depuis des décennies pour la protection des libertés fondamentales, en s’appuyant sur les principes de la Déclaration universelle des droits de l’homme adoptée en 1948.

Au fil de son histoire, la FIDH s’est illustrée par son rôle précurseur dans la promotion d’une justice internationale, ayant dès les années 1920 plaidé pour la création d’une cour pénale internationale. Plusieurs de ses dirigeants historiques, dont René Cassin, ont contribué à l’élaboration des grands textes fondateurs des droits humains. Dans le cas du Kirghizstan, la présence de la FIDH au festival Bir Duino visait précisément à soutenir les défenseurs locaux et à échanger sur les risques liés à la propagande et aux restrictions des libertés publiques.

Kirghizstan : selon les défenseurs des droits humains, il s’agit d’un précédent préoccupant

Face à ce refus d’entrée au Kirghizstan, les organisateurs du festival Bir Duino ont dénoncé une violation des droits procéduraux élémentaires, estimant que l’absence de notification écrite constituait une atteinte au droit à la liberté de circulation et à la liberté d’expression. Dans la foulée, la Fédération internationale pour les droits humains a exigé des autorités kirghizes des explications officielles et un rappel clair des engagements internationaux du pays en matière de droits humains.

Par ailleurs, l’incident a suscité des réactions au-delà du Kirghizstan. Mary Lawlor, rapporteuse spéciale des Nations unies sur la situation des défenseurs des droits humains, a exprimé son inquiétude quant à cet épisode survenu à l’aéroport de Manas, soulignant que de telles pratiques pouvaient avoir un effet dissuasif sur la coopération internationale et le travail des ONG. Cet événement est intervenu dans un contexte sensible, dix jours seulement après l’inscription de la FIDH sur la liste des organisations dites « indésirables » en Russie, de quoi renforcer les craintes d’une pression accrue sur les acteurs internationaux de défense des droits humains dans la région.

Par Païsiy Ukhanov
Le 12/18/2025

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