Kirghizstan : le parlement a voté sa propre dissolution, les élections anticipées fixées au 30 novembre 2025

Le parlement du Kirghizstan a pris ce 25 septembre 2025 une décision sans précédent : voter sa propre dissolution. Les députés, réunis en séance plénière à Bichkek, ont choisi d’abréger leur mandat afin d’organiser des élections anticipées, désormais fixées au 30 novembre 2025. Cette initiative, qui a recueilli un soutien quasi unanime, marque une étape décisive dans l’évolution de la vie démocratique du pays.

Un calendrier électoral particulièrement défavorable en 2026-2027

L’événement a été préparé par une résolution signée par 32 députés. Sur les 89 parlementaires présents, 84 ont voté pour, aucun ne s’y est opposé, et seulement cinq se sont abstenus. Selon la loi kirghize, le président Sadyr Japarov doit publier le décret convoquant le scrutin dans les cinq jours suivant la décision, ce qui permettra d’organiser l’élection d’une nouvelle assemblée dès la fin novembre 2025. C’est la première fois que le parlement kirghize prend une telle initiative, les dissolutions précédentes ayant toujours été déclenchées dans un contexte de crise ou par décision présidentielle.

Pour comprendre ce choix, il faut revenir au calendrier électoral. Les élections législatives étaient prévues en novembre 2026, suivies de l’élection présidentielle en janvier 2027. Un intervalle aussi réduit posait, selon les initiateurs, un double problème : la surcharge des institutions électorales et un coût élevé pour l’État. Le député Ulan Primov a défendu la résolution en expliquant que « l’écart de temps entre deux échéances aussi importantes est trop court ; il est donc préférable de renforcer le système politique et la stabilité en anticipant le renouvellement du parlement ».

Une réforme du système électoral est en cours au Kirghizstan

Cette décision s’inscrit aussi dans un contexte de réforme du système électoral. Le scrutin de novembre se déroulera selon de nouvelles règles : 30 circonscriptions éliront trois députés chacune, dont deux hommes et une femme. Cette disposition, adoptée récemment, vise à accroître la représentativité et à imposer un équilibre de genre inédit dans la vie politique kirghize. Pour ses promoteurs, la dissolution du parlement permet d’appliquer rapidement ces nouvelles règles au lieu de maintenir un mandat transitoire qui aurait prolongé les anciennes modalités de vote.

Au-delà des aspects techniques, la question des finances publiques a également pesé dans la balance. Organiser deux élections nationales en moins de trois mois aurait nécessité un effort logistique considérable et des dépenses importantes, difficiles à soutenir pour un pays confronté à de sérieuses contraintes budgétaires. La tenue d’un seul scrutin anticipé permettra de rationaliser les coûts et d’alléger le travail de la commission électorale centrale.

Malgré le vote de la dissolution, le parlement kirghize continuera de fonctionner pendant encore trois mois

Le choix de la dissolution n’a pas fait l’unanimité dans le débat. Le député Dastan Bekeshev a publiquement demandé pourquoi il était impossible d’attendre le printemps pour organiser le scrutin, une option qui aurait laissé plus de temps aux partis pour se préparer. De son côté, la députée Nadira Narmatova a exprimé des réserves sur la brièveté du mandat : « Nous n’avons même pas travaillé quatre ans complets », a-t-elle regretté. Elle a néanmoins voté en faveur de la résolution, affirmant que l’intérêt général devait primer.

Désormais, le parlement kirghize continuera de fonctionner jusqu’à l’installation du nouveau parlement à la fin de l’année. Pour de nombreux observateurs, cette dissolution volontaire illustre une volonté d’adaptation de la démocratie kirghize, mais aussi un moyen pour le pouvoir en place de consolider son contrôle institutionnel. L’actuelle majorité est largement acquise au président Japarov, ce qui laisse entrevoir une recomposition politique favorable au chef de l’État lors des prochaines élections.

Jamais dans son histoire récente le Kirghizstan n’avait vu son parlement prendre une telle décision sans y être contraint par une crise ou une révolution. Si elle suscite débats et interrogations, cette initiative souligne la volonté des élus de moderniser les règles du jeu démocratique et de réduire la pression sur les institutions. Reste désormais à savoir comment les électeurs accueilleront ce rendez-vous anticipé des urnes, le 30 novembre 2025, appelé à redessiner le visage politique du pays.

Par Païsiy Ukhanov
Le 09/26/2025

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