Réserves de l’Ouzbékistan : un record historique à plus de 56 milliards d’euros
Réserves de l’Ouzbékistan : un record historique à plus de 56 milliards d’euros

Les réserves de l’Ouzbékistan viennent de franchir un seuil historique, dépassant pour la première fois les 61 milliards de dollars. Ce record marque une étape majeure dans la trajectoire macroéconomique du pays, porté par l’envolée de l’or, la recomposition des actifs financiers et une stratégie monétaire de plus en plus affirmée à Tachkent.

Ouzbékistan : les réserves propulsées par l’or et la recomposition des actifs

Au 1er décembre 2025, les réserves internationales de l’Ouzbékistan ont atteint un niveau inédit. Selon les données officielles de la Banque centrale du pays, leur montant total s’établit désormais à 61,23 milliards de dollars, soit environ 56,3 milliards d’euros, au taux de change moyen de début décembre 2025. Ce chiffre confirme une accélération spectaculaire de l’accumulation d’actifs depuis le début de l’année et place désormais la question des réserves au cœur de la stabilité financière de l’économie ouzbèke.

La dynamique actuelle des réserves repose d’abord sur une progression d’une ampleur exceptionnelle en 2025. Depuis janvier, leur volume a augmenté de 48,5%. Autrement dit, près de la moitié du stock total a été accumulée en moins d’un an, ce qui constitue un rythme rarement observé dans l’histoire récente de l’Ouzbékistan. Cette expansion rapide traduit, d’une part, la montée en puissance de la production aurifère et, d’autre part, la politique volontariste menée par la Banque centrale pour renforcer les réserves du pays.
Au cœur de cette progression, l’or joue un rôle absolument central. Le volume d’or physique détenu par les autorités atteint désormais 12,2 millions d’onces troy, soit environ 379,4 tonnes. Sur les marchés internationaux, cette quantité équivaut à une valeur proche de 50,8 milliards de dollars, soit environ 46,2 milliards d’euros. Ainsi, l’or représente à lui seul plus de 80% de la valeur totale des réserves ouzbèkes. Cette concentration illustre le choix stratégique fait par l’Ouzbékistan de s’appuyer sur un actif tangible, historiquement perçu comme une valeur refuge.

Cependant, cette montée en puissance de l’or s’est accompagnée d’un recul relatif des devises dans la structure globale des réserves. Fin novembre 2025, la part des actifs libellés en monnaies étrangères ne s’élevait plus qu’à 9,8 milliards de dollars, soit environ 9 milliards d’euros. Parallèlement, la Banque centrale a renforcé sa position sur les marchés financiers internationaux en augmentant significativement son portefeuille de titres. Celui-ci atteint désormais 1,53 milliard de dollars, soit 1,41 milliard d’euros, après une hausse mensuelle de 503,3 millions de dollars, d’après Kun.uz le 6 décembre 2025. Ainsi, au-delà de l’or, les réserves s’appuient désormais sur une diversification progressive vers des instruments financiers offrant à la fois rendement et sécurité.

Les réserves au cœur de la stabilité macroéconomique de l’Ouzbékistan

L’atteinte d’un tel niveau de réserves modifie en profondeur la position extérieure de l’Ouzbékistan. D’abord, ces actifs constituent un véritable bouclier financier face aux chocs externes. En cas de tensions sur les devises, de ralentissement abrupt du commerce mondial ou de crise régionale, les autorités disposent désormais d’une marge de manœuvre considérable pour stabiliser le marché des changes, soutenir le soum ou financer les importations stratégiques. À ce titre, le franchissement du seuil des 56 milliards d’euros renforce nettement la crédibilité financière du pays auprès des investisseurs internationaux.

Ensuite, la trajectoire des réserves reflète la transformation progressive de l’économie de l’Ouzbékistan. Depuis plusieurs années, le pays mise sur l’ouverture commerciale, l’attraction des capitaux étrangers et le développement du secteur minier, notamment aurifère. L’or extrait sur le territoire national alimente directement les réserves, créant un lien structurel entre production minière et solidité financière. Ce mécanisme permet également de limiter la dépendance exclusive aux devises, tout en valorisant une ressource nationale stratégique.

Par ailleurs, la progression rapide des réserves en 2025 suggère l’existence de flux d’entrées importants, qu’il s’agisse de recettes d’exportation, de transferts de fonds ou de revenus liés aux matières premières. Même si le détail de ces flux n’est pas intégralement public, la Banque centrale laisse apparaître une capacité renforcée à absorber ces apports et à les transformer en actifs durables. Ainsi, les réserves deviennent non seulement un instrument de stabilité monétaire, mais aussi un indicateur avancé de la robustesse macroéconomique du pays.

Réserves, or et devises : quels arbitrages pour l’avenir ?

Si le niveau atteint par les réserves constitue une réussite indéniable, leur composition soulève également plusieurs enjeux stratégiques pour les autorités de l’Ouzbékistan. Le poids très élevé de l’or dans le portefeuille expose mécaniquement le pays aux fluctuations des cours mondiaux. Une baisse prolongée du prix du métal précieux pourrait, toutes choses égales par ailleurs, réduire sensiblement la valeur globale des réserves, même si les volumes physiques resteraient inchangés. Ce risque de valorisation est désormais un paramètre central de la politique monétaire.

En parallèle, la diminution relative des devises pose la question de la liquidité immédiate. Les monnaies étrangères, notamment le dollar et l’euro, permettent des interventions rapides sur les marchés financiers et facilitent le règlement des importations. L’arbitrage opéré en faveur de l’or et, dans une moindre mesure, des titres, améliore la sécurité à long terme des réserves, mais peut réduire temporairement leur flexibilité opérationnelle. C’est précisément sur ce point que la stratégie future de la Banque centrale est particulièrement attendue.

Enfin, l’ampleur atteinte par les réserves ouvre un débat sur leur utilisation potentielle. Jusqu’à présent, la priorité affichée reste la consolidation du stock. Toutefois, à moyen terme, une partie de ces actifs pourrait être mobilisée pour soutenir des projets d’infrastructure, amortir les effets de cycles économiques défavorables ou accompagner des réformes structurelles. Dans ce contexte, l’évolution conjointe de l’or, des devises et des investissements financiers déterminera la capacité de l’Ouzbékistan à transformer la solidité de ses réserves en levier durable de développement.

Illustration www.freepik.com.

Par Païsiy Ukhanov
Le 12/09/2025

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