Manas : du nouveau nom de Jalal-Abad à possible capitale du Kirghizstan
Jalal-Abad / Manas Kirghizstan

Le Kirghizstan vit depuis quelques semaines un regain de débat public autour d’un changement de capitale. Au cœur des discussions : la décision de rebaptiser Jalal-Abad en Manas, le nom héroïque du personnage épique fondateur du folklore kirghize, et les rumeurs selon lesquelles ce geste pourrait n’être que le prélude à un déménagement de la capitale de Bichkek vers ce nouveau Manas.

Kirghizstan : si déplacement de la capitale il y a, il y aura forcément un référendum

Fin septembre 2025, le parlement kirghize a adopté, en troisième lecture, le projet de loi visant à renommer Jalal-Abad en Manas. La loi a été votée le 10 septembre, puis signée par le président Sadyr Japarov le 17 septembre. Elle entrera en vigueur dix jours après sa publication officielle.

Le motif avancé pour ce changement est idéologique et symbolique. L’État veut renforcer « l’idéologie nationale » en associant la ville au nom de Manas, héros légendaire protecteur du peuple kirghize lors des invasions anciennes. Jalal-Abad, selon le maire Ernisbek Ormokoev, ne disposerait pas de fondements historiques ou scientifiques solides pour justifier son nom actuel, celui-ci reposant sur des légendes.

Mais l’idée d’un transfert de la capitale reste pour l’instant au stade hypothétique. Kamchybek Tachiev, le vice-président du Cabinet et chef de la Commission de sécurité nationale (GKNB), de facto personnage numéro deux dans le système de pouvoir kirghize, a déclaré que les autorités ne planifient pas le déplacement de la capitale de Bichkek vers Manas pour le moment. Il a cependant ajouté que si une telle proposition devait un jour être sérieusement envisagée, sa mise en œuvre devrait passer par un référendum.

Bientôt une troisième « ville d’importance républicaine » au Kirghizstan

Kamchybek Tachiev a aussi annoncé que Manas obtiendrait en 2026 le statut de « ville d’importance républicaine », ce qui la placerait dans le même cadre administratif que Bichkek ou Och. Il a qualifié le renommage de Jalal-Abad de « décision stratégique », y voyant un potentiel de développement accru pour la ville.

L’opinion publique ne semble pas unanime. Si certains soutiennent le projet comme un moyen de recentrer le développement vers le sud du pays et de renforcer l’unité nationale, d’autres dénoncent un manque de consultation, s’inquiètent du coût administratif du changement de nom et redoutent que les infrastructures ne soient pas prêtes à accueillir les institutions étatiques majeures. Le débat sur ce que signifierait concrètement « transférer la capitale » — ministères, assemblée, services publics — reste ouvert.

Manas : le changement de nom de Jalal-Abad, lui, est acté

Jusqu’à présent, aucun plan concret — calendrier, budget, ou projet de déménagement administratif — n’a été révélé. Le discours officiel renvoie constamment l’éventualité à un futur appui populaire. Le gouvernement met en avant le renforcement identitaire et l’aménagement territorial, mais la mise en œuvre reste floue.

Si le scénario d’une capitale déplacée vers Manas conserve pour l’instant le caractère d’une perspective lointaine, le changement de nom de Jalal-Abad marque un tournant symbolique fort dans la politique intérieure kirghize. Le temps dira si Manas restera une ville au riche symbole ou deviendra réellement le cœur institutionnel du pays.

Par Païsiy Ukhanov
Le 10/12/2025

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