Le Kazakhstan a une politique unique en Asie centrale : encourager le retour des kazakhs ethniques de l’étranger, appelés kandas. Ce terme, qui signifie littéralement « de même sang », désigne ceux qui, après parfois plusieurs générations passées hors du territoire, choisissent de s’installer durablement au Kazakhstan. Depuis 1991, date de l’indépendance, plus d’un million cent cinquante mille personnes ont bénéficié de ce statut. L’objectif de l’État est double : rétablir un lien avec la diaspora et renforcer démographiquement certaines régions faiblement peuplées.
Les kandas, une population plutôt jeune, mais pas toujours suffisamment formée
Au fil des années, les flux se sont transformés, mais les chiffres publiés à l’été 2025 par le ministère kazakhstanais du Travail sont clairs : les deux principales sources d’origine sont aujourd’hui l’Ouzbékistan et la Chine. En effet, 44,2 % des nouveaux kandas enregistrés viennent d’Ouzbékistan et 43,2 % de Chine, ce qui représente près de neuf retours sur dix. Le reste provient principalement du Turkménistan, de la Mongolie et de la Russie, avec des proportions bien moindres. À titre d’exemple, le Turkménistan contribue à hauteur de 5%, tandis que la Russie et la Mongolie représentent chacune moins de 3%.
Au total, au premier août 2025, 8.051 personnes avaient obtenu ce statut. Parmi elles, la majorité se trouve en âge de travailler. 59% des kandas sont actifs potentiels sur le marché du travail, 32% sont des mineurs et environ 9% sont des retraités. Le niveau d’instruction varie, mais plus de la moitié disposent d’un diplôme d’enseignement secondaire, tandis que 15% ont suivi des études supérieures et un peu plus d’un quart ont une formation technique ou professionnelle. Ces données montrent que le programme attire une population plutôt jeune, susceptible de contribuer à l’économie nationale, mais dont les compétences ne correspondent pas toujours aux besoins du marché local.
Le Kazakhstan n’accueille pas ces nouveaux venus sans préparation. Les autorités ont désigné plusieurs régions prioritaires, notamment dans le nord et l’est du pays, où la densité de population reste faible et la main-d’œuvre limitée. Pour inciter à la réinstallation, l’État propose des aides substantielles. Chaque famille reçoit une subvention d’accueil et des allocations mensuelles couvrent une partie des frais de logement et de services publics pendant un an. Les familles peuvent également bénéficier d’un certificat de mobilité économique, qui prend en charge jusqu’à la moitié du coût d’un logement, dans la limite de 4,56 millions de tenge. D’après les chiffres communiqués par le ministère, un quota annuel est fixé : en 2025, il atteignait 2.309 personnes pour les régions prioritaires, dont plus de la moitié avaient déjà été installées à la fin de l’été.
Derrière cette politique généreuse, des défis subsistent. Beaucoup de kandas peinent à s’intégrer dans les communautés locales. Certains rapatriés sont encore perçus comme des « étrangers » dans leur propre patrie, en raison de différences culturelles, linguistiques ou simplement de modes de vie hérités des pays d’émigration. Les démarches administratives sont parfois lourdes et les difficultés d’accès à un emploi stable accentuent ce sentiment de marginalité.
Ce dispositif reste néanmoins central dans la stratégie démographique du Kazakhstan. Au-delà de l’aspect identitaire, il vise à compenser les pertes liées à l’émigration des dernières décennies et à équilibrer la répartition de la population sur un territoire immense mais peu peuplé. Pour les autorités, il s’agit à la fois de renforcer le tissu social, de soutenir l’économie et de répondre à une exigence historique : ramener les kazakhs dispersés vers la terre de leurs ancêtres.