Lors de la 80ᵉ session de l’Assemblée générale de l’ONU, le président du Kazakhstan, Kassym-Jomart Tokaïev, a prononcé une allocution dense où il a appelé à une réforme urgente de l’ONU, défendu le multilatéralisme et souligné le rôle stratégique de son pays dans la diplomatie mondiale.
Réformer l’ONU pour répondre aux défis contemporains
Le 23 septembre 2025, lors du débat général de l’Assemblée générale de l’ONU à New York, le président du Kazakhstan Kassym-Jomart Tokaïev a pris la parole devant les États membres. Cette intervention s’inscrit dans le cadre de la diplomatie active du Kazakhstan, visant à renforcer sa visibilité sur la scène internationale et à faire valoir ses priorités en matière de sécurité, de gouvernance mondiale et d’environnement.
Kassym-Jomart Tokaïev a d’abord reconnu la contribution historique de l’ONU en matière de paix, de droits humains et de développement, mais il a mis en garde contre la crise de confiance à l’égard des institutions multilatérales. « De graves violations du droit international sont devenues la nouvelle norme, ce qui sape la stabilité mondiale », a-t-il déclaré. Pour le président du Kazakhstan, la réforme de l’ONU n’est pas un simple débat, mais une nécessité stratégique. Il a ainsi proposé de créer un groupe d’experts dédié à l’élaboration de propositions concrètes pour adapter l’ONU aux enjeux d’aujourd’hui. En particulier, il a plaidé pour une réforme du Conseil de sécurité afin d’offrir une représentation plus équilibrée : davantage de membres issus d’Asie, d’Afrique et d’Amérique latine, et un rôle accru pour les moyennes puissances.
Il a également souligné que les principes fondateurs de l’ONU — l’égalité souveraine des États, l’intégrité territoriale et la coexistence pacifique — sont interdépendants : « Respecter l’un, c’est respecter les deux autres ». Selon lui, fragiliser l’un de ces principes affaiblit l’ensemble.
Kassym-Jomart Tokaïev a par ailleurs évoqué l’importance de passer d’une logique de réaction aux crises à une logique de prévention, anticipant les défis émergents. Il a salué les propositions du Secrétaire général contenues dans le rapport « Our Common Agenda », les présentant comme une opportunité pour revitaliser le multilatéralisme.
Ukraine, Gaza, Caucase… : le Kazakhstan entend peser dans les conflits dans le monde
Dans son discours, Kassym-Jomart Tokaïev a abordé plusieurs crises internationales pour montrer que le Kazakhstan entend peser dans les grands dossiers diplomatiques. Il a notamment évoqué la guerre en Ukraine et la catastrophe humanitaire à Gaza. Il a appelé au respect du droit international, à la protection des civils et au règlement pacifique des différends.
Concernant le conflit dans le Caucase, il a salué la normalisation des relations entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan — initiative soutenue par les États-Unis — en déclarant : « Nous saluons la normalisation des relations entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan… le Kazakhstan privilégie la diplomatie, la désescalade et le dialogue — et non le recours à la force ».
Sur le suejt de la sécurité globale, Kassym-Jomart Tokaïev a alerté sur le recul des traités de désarmement et la montée des dépenses militaires. Il a proposé de relancer un dialogue de haut niveau entre puissances nucléaires. Il a aussi répété sa proposition de créer une Agence internationale pour la sécurité biologique, afin de prévenir les menaces sanitaires transfrontalières.
Transit de marchandises, transformation numérique et réforme constitutionnelle, les trois priorités de politique intérieure du Kazakhstan
Tokaïev a largement insisté sur la place géostratégique du Kazakhstan en Eurasie. Il a rappelé que le pays gère près de 80% du transit terrestre entre l’Asie et l’Europe, soulignant l’importance de ses investissements dans les infrastructures du corridor Nord-Sud, les liaisons trans-Caspiques et les projets liés à la Route de la soie. D’ici 2029, le Kazakhstan construira 5 000 km de nouvelles voies ferrées, a promis le chef de l’État kazakhstanais.
En matière de climat, le président du Kazakhstan a mis l’accent sur les risques liés à la mer d’Aral, à la fonte des glaciers et à la baisse du niveau de la mer Caspienne. En tant que pays assurant en ce moment la présidence tournante du Fonds international pour le sauvetage de la mer d’Aral, le Kazakhstan continuera de jouer un rôle proactif dans ce domaine, a-t-il assuré.
Il a aussi évoqué la pleine transformation numérique du pays : 90% des démarches administatives sont déjà numérisées, et l’implantation d’un superordinateur national. Il a accueilli le lancement du « UN Global Dialogue on AI Governance », insistant sur l’éthique, l’équité et l’accessibilité de l’intelligence artificielle.
Sur le plan institutionnel, Kassym-Jomart Tokaïev a rappelé la réforme constitutionnelle au Kazakhstan — notamment l’instauration d’un mandat présidentiel unique de sept ans — et sa volonté de renforcer la gouvernance, la transparence et l’état de droit. Il a également souligné que le Kazakhstan a attiré plus de 400 milliards de dollars d’investissements étrangers depuis son indépendance.
Enfin, Kassym-Jomart Tokaïev a placé le Kazakhstan comme un acteur de médiation régionale, en particulier en Asie centrale, et a suggéré d’étendre le rôle de l’Organisation de coopération et de confiance en Asie (CICA) en organisation internationale dotée de capacités accrues.