Aides au Kazakhstan : Kassym-Jomart Tokaïev durcit le ton contre l’assistanat
Discours sur l'État de la nation 2025 - Kassym-Jomart Tokaïev

Au Kazakhstan, les aides sont au cœur d’un débat politique de plus en plus frontal. En septembre 2025, le président, Kassym-Jomart Tokaïev, a remis en cause publiquement l’extension des aides, dénonçant une logique d’assistanat qu’il juge coûteuse et inefficace. Derrière cette prise de position, c’est l’ensemble du système des prestations sociales qui se retrouve sous pression, notamment à Astana, où la part du budget consacrée aux aides atteint des niveaux records.

Discours de Kassym-Jomart Tokaïev sur l’assistanat : qu’a dit le président ?

Le 16 septembre 2025, lors d’une intervention publique, Kassym-Jomart Tokaïev a provoqué un choc politique en affirmant que les citoyens actifs ne devaient pas financer ceux qui restent inactifs. Cette déclaration relance le débat sur les aides, leur ciblage, leur efficacité et leur coût dans un pays où les prestations sociales représentent une part croissante des finances publiques. Alors que les aides concernent aujourd’hui plusieurs millions de personnes, le président appelle à une réforme profonde, au nom de la justice sociale et de la responsabilité individuelle.

Le président du Kazakhstan a clairement lié la question des aides à celle de la responsabilité individuelle. Il a déclaré que « les Kazakhstanais qui travaillent ne doivent pas entretenir ceux qui ne travaillent pas ». Dans cette même intervention, il a insisté sur le fait que les aides de l’État devaient être strictement réservées aux personnes en situation de réelle détresse. Selon sa formule, « l’aide sociale de l’État doit aller uniquement à ceux qui en ont un besoin aigu, tandis que ceux qui sont capables de travailler doivent le faire », a-t-il affirmé. Ainsi, au-delà du symbole, cette prise de position marque un tournant dans la doctrine présidentielle sur les aides, l’assistanat et le rôle de l’État-providence.

Par ailleurs, le chef de l’État a directement pris l’exemple d’Astana pour illustrer ce qu’il considère comme une dérive des aides. Selon lui, environ 60% du budget municipal de la capitale serait aujourd’hui orienté vers les besoins sociaux, soit essentiellement vers les aides et les prestations sociales. Kassym-Jomart Tokaïev a également dénoncé l’existence de plus d’une centaine de dispositifs de prestations sociales, qu’il estime parfois détournés par ce qu’il a qualifié d’« assistés abusifs ». Pour le président, cette prolifération nourrit une forme d’assistanat qui fragilise l’équilibre budgétaire et affaiblit l’incitation au travail, tout en pesant sur les aides réellement nécessaires.

Aides et prestations sociales au Kazakhstan, un système étendu

En pratique, les aides et les prestations sociales au Kazakhstan forment un système vaste et très structuré. Les aides accordées aux retraités couvrent des domaines variés, allant de la prise en charge partielle des services publics, comme l’eau, le gaz ou le chauffage, jusqu’à des compensations pour l’installation de compteurs ou encore certaines dépenses médicales. Ces aides sont attribuées selon des critères précis liés aux revenus, à la situation familiale et au lieu de résidence. Toutefois, dans ce modèle, les prestations sociales restent étroitement conditionnées au niveau de ressources, ce qui vise théoriquement à limiter l’assistanat, tout en protégeant les plus vulnérables.

En outre, des aides spécifiques sont versées deux fois par an aux retraités dont le revenu par personne reste inférieur à trois fois le minimum vital national. Ce dispositif illustre la logique de ciblage défendue par les autorités, même si, dans les faits, plusieurs millions de personnes bénéficient aujourd’hui de prestations sociales de différentes natures. Dans ce contexte, les propos de Kassym-Jomart Tokaïev viennent alimenter un débat sensible, car, d’un côté, les aides assurent une stabilité sociale, mais, de l’autre, l’assistanat est régulièrement dénoncé comme un frein à l’emploi formel et à la croissance.

Aides, budget public et réformes à venir

Sur le plan budgétaire, le poids des aides et des prestations sociales atteint des montants considérables. Le ministère kazakhstanais du Travail et de la Protection sociale a consacré plus de 5,36 trillions de tenges aux pensions et aux prestations sociales en 2024, ce qui représente environ 10,7 milliards d’euros, sur la base d’une conversion approximative. Ce volume financier illustre l’ampleur du système des aides, mais aussi l’enjeu politique qu’il représente pour le pouvoir. Dans ce cadre, Kassym-Jomart Tokaïev cherche à réorienter les aides vers les publics les plus fragiles, tout en réduisant, selon ses termes, les dérives de l’assistanat.

L’exécutif prévoit cependant une poursuite de l’effort en faveur des aides dans les prochaines années. Une indexation de 10,5% des pensions et des prestations sociales est programmée pour 2026. Cette mesure concernera plus de 2,6 millions de retraités ainsi qu’environ 2,3 millions de bénéficiaires d’aides. Ce choix budgétaire montre que, malgré le discours critique du président du Kazakhstan sur l’assistanat, l’État n’envisage pas de réduire massivement les aides, mais plutôt d’en affiner le ciblage. La tension entre rigueur budgétaire, justice sociale et contrôle de l’assistanat restera donc, à court terme, l’un des axes centraux de la politique des aides au Kazakhstan.

Par Rodion Zolkin
Le 09/18/2025

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