« Hyrasia One » : le Kazakhstan souhaite fournir l’Europe en hydrogène
hydrogène

Le Kazakhstan vient de dévoiler sa stratégie ambitieuse pour l’hydrogène. Tourné vers l’Europe, le pays envisage de produire massivement, en s’appuyant sur des partenaires comme la Chine et l’Allemagne. Mais cette stratégie soulève deux questions épineuses : le pays est-il prêt à agir pour la population locale, ou seulement pour les marchés extérieurs ?

Le Kazakhstan a des projets colossaux pour l’Europe

Le projet Hyrasia One, porté par Svevind Energy Group, vise à construire à Mangystau, sur la côte de la mer Caspienne, un parc d’électrolyse de 20 GW, capable de produire 2 millions de tonnes d’hydrogène vert par an, soit 20% des besoins européens attendus en 2030. Le démarrage est prévu pour 2030, avec une mise à régime en 2032. Les autorités anticipent la décision finale d’investissement en 2026.

D’autres initiatives, comme un complexe hydrogène de 40 GW solaire à Zhambyl, complètent l’effort, orienté vers les marchés export, notamment européens.

Des partenariats internationaux au cœur du projet hydrogène

Le fil conducteur de ce projet s’appuie sur des alliances stratégiques :

– accord bilatéral avec la Chine, conclu lors du forum de coopération àAstana, pour 25 milliards de dollars d’investissement dans l’hydrogène vert ;
– accord avec Fortescue (Australie) en 2022, couvrant la production dans les régions d’Atyrau et Mangystau, ainsi qu’un mémorandum avec l’UE ;
– la participation de la France (Total, Air Liquide) et de l’Allemagne, avec 6,3 milliards $ d’accords signés pendant le Forum Allemagne-Kazakhstan.

Ces alliances s’inscrivent dans les engagements du président Tokaïev : neutralité carbone en 2060 et énergies renouvelables à 15% du mix électrique d’ici 2030.

L’exportation d’hydrogène ne fait pas l’unanimité au Kazakhstan

Sur la scène interne, le discours est plus tranchant. Le 23 juin 2025, la députée Vera Kim dénonçait lors d’un débat parlementaire ce qu’elle qualifie de « paradoxe » : « l’hydrogène part en Europe pendant que nous continuons à brûler du charbon ». Le vice-ministre Ilyas Bakytzhan reconnaît que la stratégie nationale de décarbonation est encore en élaboration, avec un plan attendu d’ici fin août 2025.

Cet argument trouve écho dans l’analyse du Carnegie Endowment, datée de septembre 2024, pointant le manque d’infrastructures et de demande européenne, et recommandant une valorisation de l’hydrogène sur place, notamment pour l’industrie locale (acier, ammoniaque, engrais).

L’hydrogène, une opportunité pour le Kazakhstan de diversifier et « verdir » son économie

La logistique transfrontalière reste un obstacle de taille. Le projet Hyrasia One prévoit un hub export via la mer Caspienne et un corridor Trans‑Caspien, transportant hydrogène et ammoniaque, pour atteindre l’Europe en environ 25 jours. Pourtant, l’UE privilégie des filières régionales comme la Norvège ou le bassin méditerranéen. Le coût estimé et l’incertitude de la demande européenne freinent les ambitions kazakhstanaises.

D’un point de vue macroéconomique, le Kazakhstan vise à diversifier une économie encore dépendante du pétrole et du charbon. Le secteur vert pourrait aussi redynamiser l’emploi : le projet Hyrasia One promet jusqu’à 3.500 emplois en construction et 1.800 postes permanents.

Sur le plan climatique, les engagements sont ambitieux : réduire les émissions de 15% d’ici 2030 (voire 25% si possible), abandonner le charbon dans les centrales et atteindre la neutralité carbone en 2060.

Illustration www.freepik.com.

Par Païsiy Ukhanov
Le 06/24/2025

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