Fourrages made in Kazakhstan : un projet agricole à 120.000 tonnes par an
fourrages

Le 22 juin 2025, les autorités kazakhstanaises ont annoncé la construction d’une nouvelle usine de fourrages dans la région de Jambyl, au sud du Kazakhstan. Prévue pour une mise en service en mars 2026, l’infrastructure vise une capacité annuelle de 120.000 tonnes de produits finis. Ce volume devrait considérablement réduire la dépendance du pays aux importations de fourrages industriels, une faiblesse chronique de la filière agricole nationale.

Une usine ancrée dans les ressources locales et la rationalité technique

Avec un coût estimé à 980 millions de tenges – soit environ 2 millions d’euros – le projet est porté par un partenariat public-privé, bien que les détails précis sur les investisseurs restent encore à préciser. Le ministère de l’Agriculture a souligné que cette infrastructure vise à « renforcer la sécurité alimentaire du secteur de l’élevage » tout en « soutenant la création d’emplois dans les zones rurales ».

L’usine ne produira pas de granulés industriels classiques, mais de la farine fourragère à destination du bétail bovin et ovin, selon la publication spécialisée Agropresskz. Elle reposera sur l’utilisation exclusive de matières premières cultivées localement : blé, orge et maïs. Un choix stratégique : au lieu de dépendre des importations d’additifs ou de composants transformés, l’installation misera sur une chaîne d’approvisionnement courte et maîtrisée.

Les experts du secteur agricole, relayés par les médias régionaux, mettent également en avant la modernisation technologique prévue dans les procédés industriels. Objectif ? Accroître la qualité nutritionnelle des produits finis, et répondre aux exigences croissantes des exploitations d’élevage intensif.

Un levier économique pour la région de Jambyl

Les ambitions du projet dépassent la sphère technique. À travers cette usine, c’est tout un tissu économique local qui pourrait être revitalisé. La région de Jambyl, bien que riche en terres arables, souffre d’un manque chronique d’infrastructures agroalimentaires, freinant la valorisation des productions agricoles.

L’entrée en service du site devrait générer de nouveaux emplois directs et indirects, notamment dans les domaines du transport, du conditionnement et de la logistique rurale. Mais au-delà des promesses habituelles, une question demeure : le Kazakhstan saura-t-il pérenniser ces investissements dans le temps, ou ces projets risquent-ils de devenir des éléphants blancs post-soviétiques, trop ambitieux pour être durablement intégrés ?

Le Kazakhstan face à son modèle agricole

En trame de fond, ce projet industriel révèle les limites d’un modèle agricole kazakh centré sur l’exportation brute de matières premières. En misant sur les fourrages transformés, le pays amorce un virage vers la valorisation locale. Mais les défis restent considérables : logistique interne défaillante, volatilité des marchés agricoles, manque de personnel qualifié, financement incertain à long terme.

Le Kazakhstan parie sur la réindustrialisation rurale. Mais rien ne garantit que les éleveurs locaux — souvent peu capitalisés — auront les moyens d’acheter ces nouveaux fourrages. Il faudra alors que l’État accompagne cet écosystème, au risque sinon de produire pour des clients absents.

Exemple concret d’une stratégie nationale à suivre

Ce chantier à Jambyl s’inscrit dans une série de projets annoncés dans le secteur agroalimentaire, à l’image de la future usine de chips Lay’s dans le même pays, qui bénéficie déjà d’incitations fiscales. Il témoigne d’un volontarisme économique, mais aussi d’une réponse aux alertes internationales sur la sécurité alimentaire régionale.

La farine fourragère n’est peut-être pas glamour. Mais c’est bien à travers ce type d’infrastructure que le Kazakhstan pourrait redéfinir son avenir agricole. Encore faudra-t-il transformer cette annonce en réussite logistique, économique et sociale. Réponse : en 2026.

Illustration www.freepik.com.

Par Païsiy Ukhanov
Le 06/23/2025

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