Un acteur discret mais stratégique s’impose dans les coulisses d’un projet nucléaire inédit au Kazakhstan. Derrière les sigles techniques et les réunions intergouvernementales, une entreprise française orchestre une mutation énergétique majeure. Qui est-elle, et pourquoi a-t-elle été choisie ?

Un savoir-faire nucléaire français au service du Kazakhstan

Le 12 juin 2025, l’entreprise française Assystem a été désignée conseillère technique officielle par Kazakhstan Nuclear Power Plants (KNPP), marquant un tournant décisif dans le programme énergétique du pays. Cette mission s’inscrit dans le vaste objectif du gouvernement kazakhstanais : atteindre 50% de production d’électricité non fossile d’ici 2050, un cap imposant pour un État encore très dépendant des combustibles fossiles.

Depuis plus de 55 ans, Assystem accompagne les États et industriels dans la mise en œuvre de projets complexes à haute intensité réglementaire. Spécialisée dans l’ingénierie nucléaire, le management de projets d’infrastructures critiques et la supervision d’exécution, l’entreprise est aujourd’hui implantée dans 12 pays et mobilise plus de 8.000 experts. Elle a contribué à des projets en Arabie saoudite, aux Émirats arabes unis ou encore en Turquie.

Au Kazakhstan, le rôle d’Assystem est central. L’entreprise n’est pas constructeur, mais architecte de méthode. Elle a été mandatée pour élaborer une méthodologie de sélection du leader du consortium international qui bâtira la première centrale nucléaire du pays, dont la puissance visée est de 2 gigawatts. Ce processus d’arbitrage repose sur des critères techniques, financiers, réglementaires et géopolitiques strictement conformes aux recommandations de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) – notamment la norme NP-T-1.10.

Un pilotage stratégique et une expertise reconnue

Le choix d’Assystem n’est pas anodin. Dans un secteur aussi sensible, le Kazakhstan mise sur un opérateur neutre, reconnu pour sa rigueur. Comme l’indique Stéphane Aubarbier, directeur général adjoint d’Assystem : « Nous sommes heureux de collaborer avec le Kazakhstan dans le cadre de son nouveau programme nucléaire. Nous nous concentrons sur sa mise en œuvre sûre et efficace, conformément aux exigences de l’AIEA et de KAES ».

Concrètement, Assystem supervise la conformité des offres technologiques, accompagne les équipes kazakhstanaises dans les phases d’appel d’offres, valide les critères de sûreté et prépare le terrain pour l’opérateur retenu. Quatre groupes industriels sont actuellement en lice pour diriger la construction : EDF (France), CNNC (Chine), Rosatom (Russie) et KHNP (Corée du Sud). Le choix du constructeur devrait être annoncé courant automne 2025.

Un levier pour la souveraineté énergétique du Kazakhstan

Derrière cette collaboration se joue l’avenir énergétique du Kazakhstan. Le pays, riche en ressources fossiles, veut désormais diversifier son mix et décarboner sa production électrique, tout en renforçant son indépendance stratégique. Le référendum national organisé en octobre 2024, approuvé à 71%, a légitimé politiquement cette trajectoire. Le site retenu se situe à Ulken, au sud-est du pays, et les premières installations pourraient voir le jour à l’horizon 2030.

Assystem accompagnera également la montée en compétences des équipes locales, à travers des modules de formation spécialisés et un transfert de savoir-faire technique. Le budget global du projet est estimé entre dix et quinze milliards de dollars américains, soit environ neuf à treize milliards d’euros.

Assystem, artisan d’une diplomatie énergétique nouvelle

En s’imposant comme chef d’orchestre discret de la préparation du chantier nucléaire kazakhstanais, Assystem confirme son rôle d’acteur incontournable de l’ingénierie nucléaire mondiale. Bien plus qu’un sous-traitant technique, l’entreprise joue ici un rôle de médiateur technologique et diplomatique, garant de la rigueur des procédures et de la fiabilité des choix opérés. Pour le Kazakhstan, c’est une condition sine qua non pour convaincre les investisseurs, rassurer la population et, surtout, réussir un tournant énergétique crucial.

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