Le Kazakhstan vient de formaliser l’instauration d’un visa pour investisseurs, déclinaison nationale d’un mécanisme bien connu des milieux économiques : la « golden visa ». Ce programme, articulé autour d’un investissement minimal substantiel, cherche à renforcer l’ancrage du Kazakhstan comme place attractive et stable dans le concert des économies émergentes. Mais derrière l’annonce, quels en sont les contours exacts, les objectifs affichés et les conditions d’accès précises ?
Un visa pour investisseurs au Kazakhstan : un tournant stratégique
Le gouvernement kazakhstanais a franchi un pas structurant en lançant un visa pour investisseurs ouvert aux ressortissants étrangers prêts à injecter un capital conséquent dans l’économie nationale. Le ministère des Affaires étrangères de la République du Kazakhstan a précisé, le 30 avril 2025, que ce dispositif repose sur plusieurs piliers clairs, articulés autour de trois objectifs : attirer les capitaux, stabiliser les relations économiques extérieures et offrir un cadre juridique rassurant aux investisseurs de long terme.
Selon les termes du programme, tout investisseur étranger ayant apporté au minimum 300.000 dollars américains (environ 280.000 euros) dans le capital social d’une entreprise kazakhstanaise ou dans des valeurs mobilières kazakhes (titres émis par des entités enregistrées au Kazakhstan) devient éligible à cette nouvelle procédure. L’investissement peut être réalisé de manière directe ou via des instruments financiers structurés, à condition que le flux de capitaux transite via un mécanisme transparent et contrôlable.
Le visa est délivré sous forme électronique, par voie numérique exclusivement, ce qui marque un effort manifeste de dématérialisation administrative de la part d’un État longtemps perçu comme bureaucratique.
Une résidence de long terme à la clé : un levier d’ancrage
Le Kazakhstan n’a pas seulement conçu une procédure d’entrée. Il y ajoute une perspective d’établissement pérenne. En effet, ce visa pour investisseurs ouvre la voie à une résidence prolongée sur le territoire national, pouvant aller jusqu’à dix ans. Ce point est capital : il ne s’agit pas d’un simple visa temporaire mais bien d’une incitation à l’installation durable, pensée pour des chefs d’entreprise, gestionnaires de portefeuille ou décideurs cherchant à tisser des liens avec l’économie kazakhstanaise.
Les bénéficiaires pourront faire venir leur famille, ouvrir un compte bancaire résident, acheter des biens immobiliers et bénéficier de la législation fiscale kazakhstanaise, qui reste relativement compétitive comparée aux standards européens.
Une logique d’alignement sur les standards internationaux
Le ministère des Affaires étrangères souligne que ce programme s’inscrit dans une dynamique internationale plus vaste : « Des dispositifs similaires ont été largement adoptés dans les pratiques internationales, notamment en Europe, aux États-Unis, aux Émirats arabes unis et à Singapour, où ils se sont révélés être des outils efficaces d’attraction des capitaux, des technologies et de l’activité économique ».
Le Kazakhstan ne cherche pas à innover ex nihilo mais à adapter à sa propre économie une recette déjà éprouvée. Cette approche pragmatique illustre un virage stratégique du pays : plutôt que des subventions étatiques massives ou des exemptions fiscales coûteuses, il privilégie une incitation contractuelle, fondée sur la sécurité juridique, la clarté des règles et la stabilité politique relative du pays.
Sécurité juridique et visibilité : deux garanties clés pour les investisseurs
Ce qui distingue ce visa des simples autorisations de séjour, c’est la sécurité réglementaire qu’il confère. Le gouvernement kazakhstanais s’engage, par ce canal, à fournir des garanties juridiques explicites aux investisseurs : stabilité du cadre fiscal, accès au contentieux commercial selon les normes internationales, et reconnaissance des droits patrimoniaux liés aux titres détenus localement.
Dans un contexte régional instable, ces engagements prennent un relief particulier. Le Kazakhstan parie sur sa relative neutralité géopolitique et son système institutionnel stable, héritage d’une transition politique maîtrisée depuis 2019, pour se positionner comme un havre économique au cœur de l’Asie centrale.
Un outil d’image et de souveraineté économique
L’objectif n’est pas seulement économique. Il est aussi diplomatique. En déployant un programme de visa pour investisseurs, le Kazakhstan cherche à rehausser son attractivité perçue, tout en contrôlant finement les flux financiers entrants. Ce visa devient un instrument de souveraineté économique : il filtre, sélectionne et oriente les investissements étrangers vers les secteurs jugés stratégiques. Le pays entend ainsi reprendre la main sur sa propre exposition aux capitaux internationaux, en privilégiant les investissements productifs sur les flux spéculatifs.
En lançant ce visa pour investisseurs, le Kazakhstan ne cherche pas à réinventer la roue, mais à positionner son économie à la jonction des grands circuits d’investissements mondiaux. Avec un ticket d’entrée clair, une procédure rationalisée, une perspective de résidence et un discours tourné vers la protection du capital, le pays pose les jalons d’un modèle hybride, à mi-chemin entre libéralisme maîtrisé et volontarisme stratégique. Reste désormais à voir si les investisseurs répondront présents.