L’Ouzbékistan muscle son offensive vers l’étranger : guichet unique, crédits et application mobile pour exporter sa main-d’œuvre
Corée du Sud marché automobile

Dans un monde où le passeport devient un outil de survie économique, un petit pays d’Asie centrale déploie des armes inhabituelles. L’Ouzbékistan, discret géant démographique, semble avoir trouvé une méthode pour transformer son trop-plein de bras en levier de croissance.

Le gouvernement de l’Ouzbékistan a officialisé une mesure inédite pour accompagner sa population dans l’aventure du travail à l’étranger. Face à un marché national saturé, le pays veut transformer ses citoyens en migrants professionnels armés de diplômes et de compétences monnayables. En mettant en place un Centre de préparation au travail à l’étranger ainsi qu’une application mobile dédiée, l’Ouzbékistan compte bien encadrer, soutenir et surtout rentabiliser l’exode de ses forces vives.

L’Ouzbékistan met en place son guichet unique pour ceux qui rêvent de travailler à l’étranger

Confronté à l’arrivée annuelle de plus de 700.000 jeunes sur son marché de l’emploi, selon l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), l’Ouzbékistan n’a plus le luxe de tergiverser.

Le nouveau Centre de préparation au travail à l’étranger fonctionnera sur le principe du « guichet unique » : un seul lieu pour toutes les formalités nécessaires avant un départ, une promesse alléchante dans un pays où la bureaucratie reste un sport national.

Concrètement, les candidats au départ pourront s’y inscrire, obtenir des conseils d’orientation professionnelle, passer des tests de langue et de compétences certifiants, déposer leurs demandes de visas de travail, et même recevoir une assistance administrative en cas de besoin à l’étranger.

Des crédits, des primes, des billets : l’Ouzbékistan investit dans ses migrants pour mieux récolter

Mais créer un centre ne suffisait pas. L’Ouzbékistan mise sur un arsenal complet d’incitations financières pour motiver les départs organisés.

D’abord, les migrants potentiels auront accès à des microcrédits de 10 millions de soums (soit environ 776 euros), remboursables sur deux ans à un taux préférentiel légèrement supérieur à la base de la Banque centrale, aujourd’hui fixée à 14%.

En parallèle, des subventions accompagneront ceux qui passent avec succès leurs certifications professionnelles ou linguistiques : jusqu’à 1,125 million de soums (87 euros) pour un certificat, 1,875 million de soums (145 euros) pour la délivrance d’un visa de travail, et 750.000 soums (58 euros) pour l’achat d’un billet d’avion.

Plus surprenant encore : même les enseignants ne sont pas oubliés. Cinquante professeurs, dont les élèves décrocheront des certifications en allemand, anglais, japonais ou coréen (niveau minimum B1), recevront chacun 50 millions de soums (environ 3.883 euros) à titre de récompense nationale.

L’application mobile ouzbèke : travailler à l’étranger devient aussi simple qu’envoyer un texto ?

Et parce qu’au XXIᵉ siècle un guichet sans application serait aussi anachronique qu’une poste sans colis, l’Ouzbékistan lance une application mobile dédiée aux migrants.

Cet outil permettra, comme le précise le décret consultable sur Lex.uz, d’accéder :

– aux offres d’emploi à l’étranger,
-aux associations d’entraide pour les Ouzbeks en difficulté,
– aux organisations internationales partenaires,
– à des services de transfert d’argent vers le pays natal.

Le tout connecté à une base de données nationale regroupant dès juillet 2025 tous les départs et arrivées sur le territoire.

En Ouzbékistan, près de 20% de la population active vit déjà de l’autre côté des frontières, soit près de 2,5 millions de personnes. Ce chiffre, loin de faire peur à Tachkent, est perçu comme un atout stratégique. Exporter ses travailleurs, oui, mais les former, les encadrer, et en tirer des devises sonnantes et trébuchantes : voici le pari ambitieux d’un pays qui, plutôt que de craindre la fuite de ses talents, décide de la monétiser.

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