Le 1er juin 2025 marquera un tournant discret mais décisif pour l’Ouzbékistan. Le pays, en quête de financements et d’ouverture économique, a décidé d’embrasser une stratégie aussi flatteuse qu’ambivalente : l’instauration d’un dispositif de « visa doré ». Par décret présidentiel daté du 18 avril 2025, les autorités ouvrent les portes d’un titre de séjour longue durée aux investisseurs étrangers.
L’Ouzbékistan joue la carte du capital : un titre de séjour contre 200.000 dollars
L’Ouzbékistan veut de l’argent frais. Avec cette mesure, le gouvernement offre un titre de séjour de cinq ans à tout ressortissant étranger ou apatride capable de transférer 200.000 dollars américains (environ 187.000 euros) dans les caisses de l’État. Et ce n’est pas tout. Pour chaque membre de la famille — conjoint, enfant ou parent — qui accompagnera le demandeur principal, il faudra ajouter 100.000 dollars (près de 93.500 euros) supplémentaires.
Le décret ne s’embarrasse pas de fioritures : pas besoin d’acheter un appartement à Samarcande ou une villa à Boukhara. Aucune obligation immobilière ne pèse sur les candidats au titre de séjour. Le transfert monétaire suffit. Une approche cash, littéralement. À noter que le « visa doré » ouzbek sera valable cinq ans.
Avec ce système, Tachkent entend cibler une catégorie précise : les élites financières, les entrepreneurs étrangers, les nomades fortunés lassés des juridictions surchargées comme le Portugal ou les Émirats. Ce n’est pas la première fois que l’Ouzbékistan flirte avec l’argument de l’investissement pour faciliter l’entrée sur son territoire. Mais cette fois, la ligne est claire, assumée, et — osons le mot — marchande.
Un dispositif qui en cache un autre : les voies alternatives de résidence
Il serait injuste de réduire la stratégie migratoire ouzbèke à cette unique mesure. Le pays maintient des canaux parallèles d’accès au titre de séjour, fondés cette fois sur l’achat de biens immobiliers. Pour obtenir un titre de séjour via ce canal, il faut acquérir un bien d’une valeur minimale de 300.000 dollars à Tachkent, ou descendre à 200.000 dollars dans certaines régions, voire 100.000 dollars au Karakalpakstan.
Séduire l’étranger pour financer l’interne : pari gagnant ou fuite en avant ?
L’Ouzbékistan suit une trajectoire déjà empruntée par de nombreux pays. Du Portugal à l’Espagne, des Émirats aux Antilles, les visas contre investissement se sont multipliés dans les deux dernières décennies. Et comme ailleurs, la manœuvre est double : injecter du capital dans l’économie locale, tout en valorisant le pays comme une destination sécurisée et accueillante pour les grandes fortunes.
Mais une question demeure. À qui profite ce visa doré ? À l’investisseur, qui obtient une porte d’entrée stable dans un pays en plein essor ? Ou au gouvernement, qui renfloue ses caisses sans engager de contrepartie réelle ? Le président Mirziyoyev aurait sans doute une réponse. Mais le décret, lui, reste muet sur l’usage précis des fonds collectés.