C’est désormais officiel : Burger King s’implantera en Ouzbékistan d’ici deux à trois mois. Une confirmation de poids dans un marché longtemps resté à l’écart des grandes franchises américaines, malgré les spéculations répétées autour d’une possible arrivée de McDonald’s. Le roi du whopper prend les devants, et cette fois, il ne s’agit pas d’une simple rumeur, mais bien d’une stratégie ambitieuse menée par un partenaire local solide.
Burger King en Ouzbékistan : une offensive orchestrée par Pepsi ?
L’annonce ne vient pas d’un acteur secondaire. C’est Choukhrat Ergachev, fondateur d’International Beverages Tashkent, embouteilleur officiel de Pepsi en Ouzbékistan, qui a révélé les projets de lancement de Burger King dans le pays, lors d’une réunion présidée par le chef de l’État, Shavkat Mirziyoyev. Un détail loin d’être anodin : la synergie entre les boissons Pepsi et la restauration rapide est une vieille histoire, renforcée ici par l’ambition de Choukhrat Ergachev de faire de Tachkent un hub régional pour Burger King en Asie centrale.
« Nous avons obtenu la licence officielle de Burger King. L’objectif est d’ouvrir les premiers restaurants dans les deux à trois mois », a-t-il fait savoir. La société ambitionne également de délivrer des licences à d’autres partenaires dans la région, plaçant l’Ouzbékistan en tête de pont de l’expansion centre-asiatique de l’enseigne américaine.
Burger King n’en est pas à son premier essai en Ouzbékistan. Dès 2021, la société kazakhstanaise Holten Group avait annoncé un accord de master franchise avec Burger King Corporation pour la région, avec des promesses d’ouverture de filiales à Tachkent. Mais faute de concrétisation, l’initiative était tombée dans l’oubli. Cette fois, c’est un acteur bien implanté, disposant d’un réseau logistique national et d’un portefeuille industriel local, qui tient les rênes.
McDonald’s, l’éternel fantôme ouzbek
À l’inverse, McDonald’s semble condamné à n’être qu’un mirage pour les consommateurs ouzbeks. Pourtant, les apparences sont trompeuses : marques déposées, dépôts récents, rumeurs de construction. Mais la réalité est plus complexe, et surtout juridique.
En mars 2024, la société locale Reach Impex a déposé deux demandes d’enregistrement de la marque McDonald’s auprès de l’Agence pour la propriété intellectuelle du ministère de la Justice ouzbek. Fondée en avril 2022 avec un capital de 211 millions de soums, Reach Impex est dirigée par Bahodir Usmanov, frère du milliardaire russe Alisher Usmanov. De quoi nourrir les fantasmes et les spéculations.
Mais rien n’est simple dans le royaume des marques. Car dans le même temps, McDonald’s Corporation a elle-même renouvelé ses marques historiques, enregistrées en Ouzbékistan depuis les années 1990, et a soumis neuf nouvelles demandes, actuellement en cours d’examen. La confusion est donc entretenue, et l’avenir judiciaire de la situation reste incertain, un procès ayant été annoncé au tribunal économique interdistrict de Tachkent.
Pourquoi McDonald’s n’a-t-il pas encore ouvert en Ouzbékistan ?
La réponse tient en un mot : exigences. Comme l’explique l’économiste Timurmalik Elmuradov sur son canal Telegram, interrogé par, McDonald’s impose des normes draconiennes à ses franchisés : certification rigoureuse de la chaîne logistique, traçabilité intégrale, standards de qualité souvent inaccessibles aux producteurs locaux, notamment dans le secteur de la viande. « Aucun fournisseur régional ne satisfait actuellement aux critères », résume-t-il. En d’autres termes : pour servir un Big Mac à Tachkent, il faudrait d’abord restructurer toute une industrie agroalimentaire.
L’échec du franchisé kazakhstanais après l’interdiction des importations russes par McDonald’s, consécutif à la guerre en Ukraine, a laissé des traces : l’enseigne ne prend plus de risques en Asie centrale. En attendant, Reach Impex rêve à voix haute, McDonald’s garde le silence, et les consommateurs continuent d’espérer… ou de se rabattre sur KFC et Pizza Hut, en attendant l’arrivée de Burger King.
L’empire de Burger King : où s’arrête-t-il ?
Présent dans plus de 100 pays, Burger King s’est longtemps positionné comme l’éternel challenger de McDonald’s. Mais à y regarder de plus près, l’enseigne a su s’implanter dans des marchés plus risqués ou délaissés par son rival. De l’Afrique subsaharienne au Moyen-Orient, elle multiplie les concessions et s’accommode mieux de standards alimentaires plus souples. En Asie centrale, seul le Kazakhstan bénéficiait jusqu’à présent de ses services. Son arrivée en Ouzbékistan marque donc un tournant.
Une implantation stratégique, un message politique ?
Cette installation dépasse la simple logique commerciale. Le président ouzbek, Shavkat Mirziyoyev, n’a pas manqué de saluer l’arrivée de Burger King comme un signal fort pour les investisseurs étrangers. En toile de fond, l’ouverture progressive de l’économie ouzbèke, longtemps fermée, et la volonté d’attirer les grandes marques mondiales pour renforcer l’image de modernité du pays. Et quoi de plus emblématique qu’un whopper pour symboliser l’occidentalisation du tissu urbain ?
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