Ruée des capitaux vers le Kirghizstan : qui mise sur ce pays d’Asie centrale ?
Kirghizstan investissements

Le 16 avril 2025, le ministère kirghize de l’Économie publiait les données économiques du premier trimestre 2025. Un chiffre saute aux yeux : les investissements dans le capital fixe ont connu une croissance de 90,6% par rapport à la même période de 2024. Derrière cette hausse brutale, se dessinent des stratégies industrielles, des priorités gouvernementales… et quelques interrogations.

Investissements : le Kirghizstan séduit, mais avec ses propres moyens

L’euphorie est palpable dans les cercles politiques de Bichkek. Sur les trois premiers mois de 2025, 56,8 milliards de soms (environ 590 millions d’euros) ont été injectés dans l’économie, selon les données officielles du ministère de l’Économie du Kirghizstan. Ce chiffre marque une croissance record de 90,6 % par rapport au premier trimestre 2024.
Mais derrière l’apparente manne, une réalité plus nuancée émerge : les investissements étrangers ont reculé, tandis que les ressources internes ont doublé. Le pays capitalise sur ses propres fonds pour financer sa transformation. D’où la question : les investisseurs internationaux sont-ils vraiment au rendez-vous ?

Où l’argent coule-t-il ? Focus sur les secteurs d’investissement

Difficile de parler d’investissements sans évoquer leurs destinations. L’extraction minière figure en tête, suivie de près par l’industrie manufacturière, les technologies de l’information et de la communication (TIC), l’énergie, l’éducation et le logement. Dans le détail, la construction affiche une hausse de +69 %, notamment grâce au projet « Менин үйүм » (Mon logement), vitrine sociale du gouvernement. La production de clinker (composant clé du ciment) à l’usine de Kant bat son plein. Les géants de la téléphonie MegaCom et O! investissent dans de nouvelles stations-relais. Autour du lac Issyk-Koul, les pelleteuses tracent une nouvelle route périphérique, pendant que les municipalités développent infrastructures et zones touristiques.

Secteurs producteurs : croissance, mais prudence

Le tableau industriel n’est pas sans éclats : la production de pharmaceutiques grimpe de 41,7%, celle des produits alimentaires et tabacs de 70%, et les matériaux de construction de 43%. En revanche, l’industrie textile et l’extraction minière enregistrent des baisses respectives de 12,1% et 3,6%. Ce ralentissement dans la filière minière, pourtant stratégique, interroge. Est-ce un signe de transition vers des secteurs à plus forte valeur ajoutée ou un indicateur d’instabilité dans l’exploitation des ressources naturelles ?

Services et infrastructures : un pari sur l’avenir

Le secteur des services capte à lui seul 51% du PIB du pays. Les hôtels et restaurants voient leur activité bondir de 26,4%, selon le ministère. Une croissance stimulée par le développement du tourisme et l’augmentation des revenus domestiques.

Les opérateurs télécoms étendent leur réseau, alors que le gouvernement modernise à marche forcée les infrastructures urbaines à Bichkek. Ces chantiers absorbent une part croissante des capitaux investis.

Et les capitaux étrangers dans tout cela ?

Voici le point d’ombre. Le ministère de l’Économie lui-même admet que « le volume des sources de financement externes a diminué d’un facteur 1,5 ». En d’autres termes, les investisseurs étrangers ne suivent pas le rythme effréné des investissements domestiques. Pourquoi cet effacement ? L’instabilité politique récurrente, les tensions avec certains partenaires commerciaux, ou encore la faiblesse du système bancaire local peuvent expliquer cette méfiance. L’avenir dira si ce pays d’Asie centrale parvient à transformer ce boom en développement structurel — ou s’il s’agissait d’un feu de paille financé à crédit. Une chose est sûre : les chantiers, eux, avancent.

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