Une usine de traitement de déchets verra le jour à Almaty en 2025

Le 10 avril 2025, le gouvernement du Kazakhstan a officialisé un partenariat avec l’entreprise chinoise Shanghai SUS Environment Co., Ltd pour la construction d’une usine de traitement de déchets dans la métropole d’Almaty. L’annonce, faite par le Premier ministre Olzhas Bektenov, s’inscrit dans une politique de transition énergétique par la valorisation des déchets ménagers. Une date de mise en service est d’ores et déjà fixée : juin 2025.

Une usine de traitement de déchets pour répondre à l’urgence environnementale d’Almaty

Dans une ville où s’accumulent chaque année des milliers de tonnes d’ordures, le projet d’usine de traitement de déchets intervient comme une solution technique, politique, mais aussi symbolique. Almaty, en proie à une urbanisation galopante, peine à suivre le rythme en matière d’infrastructures de gestion des déchets solides. Le chantier confié à Shanghai SUS Environment Co., Ltd, mastodonte chinois de la valorisation énergétique, prévoit une capacité de 2.000 tonnes de déchets traités par jour.

Au cœur du processus industriel : une technologie « Waste-to-Energy », c’est-à-dire la transformation des déchets en électricité. L’usine sera capable de générer jusqu’à 60 mégawatts, de quoi alimenter plusieurs quartiers entiers. Le coût de l’opération ? 270 millions de dollars américains, soit environ 250 millions d’euros.

Des ambitions officielles… et des chiffres politiques

Dans un contexte de pression démographique et de défis écologiques croissants, l’usine est présentée comme un jalon majeur de la stratégie nationale. « Le président Kassym-Jomart Tokaïev a fixé un objectif de 38% de recyclage des déchets communaux d’ici 2029. Plus de 4,5 millions de tonnes de déchets sont générées chaque année dans notre pays. La construction de cette usine est un projet nécessaire », a déclaré Olzhas Bektenov.

Du côté des autorités locales, le ton est tout aussi volontariste. Le lancement de l’usine devrait permettre à Almaty de couvrir l’intégralité de ses besoins en traitement des déchets et de hisser son taux de recyclage à 80% d’ici 2029, selon les projections de l’administration municipale. En d’autres termes, l’usine se veut la pierre angulaire d’un basculement vers une économie circulaire ambitieuse… sur le papier.

Shanghai SUS Environment : un colosse aux pieds solides ?

Fondée en 2008, Shanghai SUS Environment Co., Ltd n’est pas un nouveau venu. L’entreprise revendique 40% du marché chinois de la valorisation énergétique des déchets, et une présence dans 84 projets à l’international. Elle a récemment obtenu un contrat de 497 millions de dollars pour une usine à Bagdad, et est également impliquée en Indonésie et au Vietnam. Le groupe développe des parcs éco-industriels, combinant incinération, tri, recyclage et production d’énergie dans des zones intégrées.

Ce profil impressionnant soulève une question légitime : pourquoi le Kazakhstan confie-t-il un projet aussi stratégique à une entreprise étrangère ? Le choix d’un acteur chinois n’est pas anodin dans une région historiquement soucieuse de préserver son autonomie énergétique et industrielle. D’autant plus que le secteur des déchets n’échappe plus aux logiques de souveraineté environnementale.

Kazakhstan déchets

Une main-d’œuvre locale en vitrine… mais à quel prix ?

Pour rassurer l’opinion publique, le gouvernement kazakh a insisté sur les retombées sociales du projet. Selon les termes de l’accord, 500 emplois seront créés, dont 100 permanents. « Les spécialistes locaux seront recrutés en priorité », a assuré Lun Zhi Shen, président de Shanghai SUS Environment.

Mais derrière ces chiffres, la réalité reste à nuancer. L’exploitation d’une telle infrastructure implique une expertise technique pointue, généralement importée avec le contrat. La création d’emplois sera-t-elle durable, qualifiée, locale ? Ou faut-il s’attendre à une sous-traitance massive et à une dépendance prolongée envers l’opérateur chinois ?

Un projet éco-industriel… ou un habillage vert ?

Officiellement, les technologies utilisées répondront aux normes environnementales les plus strictes. L’entreprise chinoise affirme même que l’usine sera un modèle d’écologie industrielle, dans la lignée de ses précédents projets. Pourtant, les installations « Waste-to-Energy » sont souvent critiquées pour leurs émissions, leur coût énergétique élevé, et leur faible rendement dans certains contextes.

Autrement dit, la conversion des déchets en électricité, si séduisante en théorie, ne garantit ni une réduction drastique des volumes de déchets, ni une réelle transition vers une société bas carbone. À cela s’ajoute l’opacité du contrat : aucun détail n’a été publié concernant la durée d’exploitation, les garanties environnementales, ou les conditions de financement.

Une usine de traitement de déchets : solution ou symptôme ?

Derrière les chiffres flatteurs et les discours engagés, l’usine de traitement de déchets d’Almaty soulève plus d’interrogations qu’elle n’en résout. Elle incarne à la fois une ambition légitime de modernisation écologique et un aveu de dépendance technologique. Le Kazakhstan fait le pari d’un partenariat avec un géant chinois pour sortir de l’impasse environnementale. Reste à savoir si cette alliance permettra d’ancrer une véritable souveraineté écologique… ou si elle ne fera que verdir un modèle encore largement linéaire.

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