La Russie a annoncé son adhésion imminente au système énergétique intégré de l’Asie centrale. Cela permettra aux pays d’Asie centrale de mieux gérer les déficits (surtout) et, dans une moindre mesure, les excédents de production. La Russie, quant à elle, aura un levier de plus pour retenir les pays d’Asie centrale dans son fief sur le plan politique.
Permettre une réponse rapide aux fluctuations des besoins des différents pays
Le 9 septembre, la Russie et l’Ouzbékistan ont officiellement annoncé l’intégration de la Russie dans le système énergétique commun d’Asie centrale. L’« Opérateur du Système » russe jouera un rôle clé dans la gestion des flux d’électricité entre les pays membres, facilitant un équilibre énergétique entre les différentes nations. Cette coopération ne vise pas uniquement à favoriser les exportations d’énergie, mais aussi à mieux gérer les échanges en cas de surcharge du réseau ou de pénuries soudaines dues à des conditions climatiques ou à des pics de consommation.
L’objectif de cette coopération est de sécuriser les approvisionnements et de permettre une réponse rapide aux fluctuations des besoins des différents pays. Lors d’une crise énergétique, par exemple, la Russie pourrait fournir de l’électricité à l’Ouzbékistan ou au Tadjikistan pour éviter des interruptions massives. Cette capacité à réguler les flux permettra d’assurer la stabilité du réseau sur toute la région. Ce projet de connexion entre la Russie et le réseau asiatique central s’inscrit dans un contexte plus large de développement énergétique régional.
Le retour du Tadjikistan dans le réseau énergétique commun
Le Tadjikistan, après des années de préparation, avait réintégré le système énergétique d’Asie centrale en juin 2024 en approuvant la « Stratégie de développement de la coopération énergétique des États membres de l’Organisation de coopération de Shanghai jusqu’en 2030 ». Cette réintégration permet au pays de mieux répondre à ses propres besoins tout en contribuant à l’équilibre énergétique régional. Cette initiative inclut des efforts pour diversifier les routes d’exportation d’énergie et renforcer les infrastructures locales.
Le Tadjikistan, grand producteur d’énergie hydraulique, a bénéficié d’un financement de 35 millions de dollars de la Banque asiatique de développement pour rénover ses infrastructures et se reconnecter au réseau régional. Ce projet, initialement prévu pour se terminer en 2022, permettra au Tadjikistan de garantir une meilleure fiabilité de son réseau et de contribuer aux besoins de ses voisins. Ce retour dans le réseau régional est particulièrement important pour un pays dont la majorité des besoins énergétiques sont couverts par l’hydroélectricité, notamment en période estivale où il fournit de l’eau et de l’électricité aux pays voisins.
Histoire du système énergétique commun d’Asie centrale
Créée en 1960 sous l’Union soviétique, l’Organisation énergétique commune d’Asie centrale permettait de répondre aux besoins saisonniers en eau et en énergie des différentes républiques. En hiver, le Tadjikistan et le Kirghizistan stockaient l’eau dans leurs réservoirs, tandis qu’ils recevaient du gaz et du charbon d’Ouzbékistan, du Kazakhstan et du Turkménistan. En été, les rôles s’inversaient, avec un partage de l’eau pour l’irrigation agricole.
Après l’effondrement de l’URSS, plusieurs pays ont quitté ce système, mettant à mal l’interdépendance énergétique de la région. Cependant, en 2014, des discussions ont commencé pour rétablir ces échanges. Une déclaration commune a été signée en 2019 pour renforcer la coopération énergétique, et en 2021, le Tadjikistan a officiellement annoncé son retour dans ce réseau. Sa réintégration est considérée comme cruciale pour stabiliser l’offre en électricité dans la région, notamment grâce à son potentiel hydraulique unique. La Russie, elle, a besoin comme jamais d’alliés sur le plan politique : depuis qu’elle a commencé sa guerre d’agression contre l’Ukraine, l’Iran et l’Asie centrale sont devenus ses principaux partenaires, la majeure partie de l’Afrique, de l’Asie et de l’Amérique du Sud hésitant encore à émettre haut et fort leur jugement sur ce dossier. Cette dépendance renforcée vis-à-vis de la Russie laissera donc aux pays de la région moins de marge de manœuvre pour oser dénoncer les hostilités perpétrées par l’armée russe sous les ordres de Vladimir Poutine.
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